03 juin 2021
La mixité au sein des entreprises : nous pouvons tous faire mieux
Dans le cadre de notre lettre semestrielle ESG, nous avons choisi de faire un point sur la mixité au sein des entreprises. Malgré de nombreuses actions politiques en Europe (et notamment en France), pour encourager la mixité, les effets escomptés ne sont malheureusement pas tout à fait encore au rendez-vous.
Pourtant les entreprises sont conscientes de ces défis et adhèrent de plus en plus à des initiatives qui prônent la mixité comme créatrice de valeur et de performance pour les entreprises. De son coté, Amplegest a choisi de s’engager aux côtés du 30% Club France Investor Group pour stimuler et accompagner les entreprises dans l’instauration de leurs politiques de mixité.
DE MAIGRES PROGRÈS
Les femmes dans les conseils d’administration et comités exécutifs
Au sein de l’Europe, 8 pays ont mis en place des quotas pour leur conseil d’administration et les résultats sont au rendez-vous contrairement à leurs homologues. En 2017, en France, l’objectif de la Loi Copé-Zimmermann de 40% de femmes dans des conseils d’administration est atteint (contre 22 % en moyenne pour l’indice MSCI World). Rétrospectivement, les progrès ont été lents au cours des dix dernières années et de grandes disparités subsistent. En Europe occidentale, entre 2007 et 2017, la plupart des pays ont augmenté la représentation des femmes dans les conseils d'administration dans des proportions à deux chiffres, dont 30 points de pourcentage en France et en Italie et 17 points de pourcentage en Allemagne(1).
Mais la gouvernance d’une entreprise se joue majoritairement dans le comité exécutif. Pour aller plus loin et inverser la tendance, des quotas pour les comités exécutifs sont envisagés en ce moment même par le Haut conseil à l'égalité hommes-femmes en France(2). Parmi les pays du G20, les femmes ne représentent que 12% dans les comités exécutifs. En 2020, la part des femmes dans des comités exécutifs des 30 plus grandes entreprises dans leur indice respectifs est de 13% en Allemagne, 22% en France, 25% en Grande-Bretagne et 29% aux Etats-Unis(3).
Alors la mesure et le suivi de l’évolution des critères de mixité sont primordiaux pour tendre vers un modèle égalitaire. De nombreux indices ont été mis en place pour évaluer la situation actuelle.
L’index de l’égalité professionnelle
En France, l’index de l’égalité professionnel a été créé en 2018 dans l’objectif d’éradiquer toute inégalité professionnelle en France. Depuis 2020, les entreprises de plus de 50 salariés se doivent de publier cet indice. Sous la forme d’une note sur 100, l’index de l’égalité femmes-hommes se compose de cinq grands critères qui évaluent les inégalités femmes / hommes dans les entreprises. Cet indice permet non seulement de comparer les efforts fournis par les entreprises en termes de mixité mais aussi de les pousser à mieux agir. (1)
Les 5 critères sont les suivants :
-L’écart de rémunération femmes-hommes, qui est le critère le plus important car il compte pour près de la moitié de la note globale. L’indicateur recense les rémunérations moyennes des femmes et des hommes dans une entreprise.
-L’écart dans les augmentations annuelles. Pour obtenir l’intégralité des points, une entreprise devra accorder les mêmes augmentations aux femmes qu’aux hommes, à 2% près ou à deux personnes près.
-L’écart dans les promotions. La totalité des points sera attribuée aux entreprises qui, au cours de l’année, promeuvent autant de femmes que d’hommes à 2% ou à deux personnes près.
-Les augmentations au retour de congé maternité. La totalité de la note sera attribuée à une entreprise qui accorde une augmentation aux femmes revenant d’un congé maternité.
-La présence de femmes parmi les plus gros salaires de l’entreprise. Une entreprise devra compter au moins quatre femmes parmi ses dix plus hauts salaires.
(1)Source : McKinsey & Company, octobre 2017. Women Matter Time to accelerate, Ten years of insights into gender diversity
(2)Source : Le Figaro, Entreprises : le Haut Conseil à l’égalité veut 40% de femmes dans les comités exécutifs et de direction
(3)Source : All Bright, septembre 2020, The share of women on DAX Executive Boards declines during crisis
Chaque année, les entreprises françaises de plus de 50 salariés doivent publier sur Internet le score obtenu à l’index d’égalité femmes-hommes. S’il est inférieur à 75 sur 100, elles seront sanctionnées financièrement jusqu’à 1% de leur masse salariale(1).
En 2020, un suivi de l’évolution de cet indicateur a montré une nette amélioration de la publication de l’indice, le taux de répondants est passé de 59% à 70% entre 2020 et 2021 (publication au 1er mars de chaque année). La note moyenne est également en progression puisqu’elle a pris 1 point de base par rapport à 2020. Cependant 98% des entreprises doivent fournir un effort supplémentaire pour atteindre la norme qui est d’obtenir une note de 100%. En effet, en 2021, seulement 2% des entreprises ont obtenu la note maximale. Les indicateurs qui sont encore à la traîne en 2021 sont le retour de congé maternité et la mixité dans les 10 meilleures rémunérations(2).
LA MIXITE CRÉATRICE DE VALEUR ET DE PERFORMANCE
Mixité/Performance
Non seulement la performance des entreprises s’améliorerait si plus de femmes étaient représentées au sein des instances dirigeantes ou des employés, mais également la valeur des entreprises s’intensifierait.
Plusieurs rapports de recherches soulignent la corrélation entre la mixité et l’amélioration de la performance opérationnelle et organisationnelle des entreprises. L’entrée de femmes sur le marché du travail serait un élément clé pour contrer le vieillissement de la population.
De plus, afin de pouvoir fournir un vivier de talents équilibré entre les genres pour la sélection de membres hautement qualifiés au sein du conseil d’administration, les femmes doivent également avoir accès à des postes de haute direction au préalable. L’Institut de Recherche du Crédit Suisse a constaté que les femmes dirigeantes d’entreprise ont une probabilité plus élevée de 50% d’embaucher une femme à la tête de la direction financière et de 55 % pour d’autres femmes à des postes de direction(4).
Aussi, un environnement inclusif permet une multiplicité de perspectives et donc une meilleure prise de décision. Une meilleure représentation des femmes permet d’ailleurs une meilleure compréhension des besoins clients(4). Enfin, la mixité dans son sens général permet une meilleure perception de la part des employés et favoriserait la fidélisation des employés et des clients(6).
Mixité/Valeur
Il existe une vraie causalité entre le nombre de femmes dans la fonction de management (voir ci-dessous)/conseil d’administration et le prix de l’action d’une entreprise(5) :
CHIFFRES CLÉS
+47% de rentabilité et +55% de marge d’EBIT pour les entreprises qui se classent parmi les meilleures en termes de représentation de femmes aux comités exécutifs(3)
+15% de rentabilité pour les entreprises avec 30% de femmes à des postes de direction(4)
30% de femmes dans les instances d’administration amène 22% de femmes au management(5)
+12 000 milliards $ s’ajouteraient au PIB mondial en 2025 si tous les pays s'alignaient sur le pays de sa région qui a la meilleure progression vers la mixité hommes-femmes de sa main-d'œuvre(3)
10 femmes occupent les postes de PDG, DG ou de présidente du directoire au sein du SBF120 post-AG 2019(7)
(1)Source : Site du gouvernement, https://www.gouvernement.fr/index-de-l-egalite-femmes-hommes-comment-ca-marche
(2)Source : Site du gouvernement https://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/210307_mtei_infog_indexegapro.pdf
(3)Source : McKinsey & Company, octobre 2017. Women Matter Time to accelerate, Ten years of insights into gender diversity
(4)Source : Peterson Institute for International Economics, février 2016. Is Gender Diversity Profitable ?
(5)Source : Credit Suisse Research, octobre 2019. CS Gender 3000
(6)Source : James J. Cordeiro, Susan Stites-Doe, 1997 “The impact of Women managers on Firm Performance: Evidence from Large U.S. Firms”,
(7)Source : Baromètre IFA – Ethics & Boards 2020
AMPLEGEST S’ENGAGE
Des propositions pour encourager la mixité
Pour combler ou réduire l'écart entre les genres, trois facteurs clés peuvent être pris en compte(1) :
Premièrement, les femmes ne sont pas aussi nombreuses que les hommes à faire partie de la population active; l'augmentation de la participation des femmes à la main-d'œuvre représenterait 54 % du PIB supplémentaire potentiel. C’est pourquoi nous avons décidé d’inclure dans notre modèle ESG interne, le modèle GEST, le critère du taux de femmes employées dans l’entreprise.
Deuxièmement, les femmes doivent avoir accès à des postes de dirigeantes pour pouvoir avoir une réelle influence sur la mixité, qu’elle soit dans l’entreprise même ou bien dans les sociétés de gestion. Notre second critère de mixité dans notre modèle GEST est le taux de femmes dans des postes de direction supérieurs; car comme décrit précédemment les femmes ont plus de chance d’en recruter ou d’investir dans des entreprises dirigées par des femmes. Pour pallier à cela, aujourd’hui, Amplegest s’engage avec le « 30% Club Investor Group » pour aider les femmes à avoir accès à des postes de dirigeantes et membres de comité exécutif.
Troisièmement, les femmes sont représentées de manière disproportionnée dans les secteurs à faible productivité, tels que l'agriculture, et insuffisamment représentées dans les secteurs à plus forte productivité tels que les services aux entreprises. Le transfert des femmes vers des secteurs à plus forte productivité, à l'instar de l'emploi des hommes, contribuerait à un autre 23% de l'opportunité totale.
L’initiative « 30% Club Investor Group » (2)
Six sociétés de gestion représentant près de 3000 milliards d'euros d'actifs sous gestion - Amundi, AXA Investment Managers, La Banque Postale Asset Management, Sycomore Asset Management, Mirova et Ostrum Asset Management - ont créé le 30% Club France Group Investor afin de promouvoir une meilleure mixité au sein des équipes dirigeantes du SBF 120.
Ses objectifs sont les suivants :
-coordonner l'approche de la communauté des investisseurs en matière de diversité, en particulier pour expliquer les arguments en faveur de conseils d'administration et d'équipes de direction plus diversifiés
-exercer les droits de propriété, y compris le vote et l'engagement, afin d'obtenir des changements dans les conseils d'administration des entreprises et au sein des équipes de direction
-encourager tous les investisseurs à s'engager sur la question de la diversité avec les présidents des conseils d'administration et des équipes de direction.
Analyse des critères de mixité du modèle GEST
Parmi l’univers d’investissement du STOXX Europe 600, nous avons analysé les critères de mixité de notre modèle propriétaire GEST.
Tout d’abord, nous percevons une faible évolution du taux de femmes employées en entreprise qui atteste du manque de moyens ou de volonté de recruter plus de femmes. Les causes sont multiples : masculinisation de certains métiers (ingénieurs par exemple) ou manque de financement d’entreprises dirigées par des femmes. Pour remédier à cela, les entreprises doivent diversifier leurs sources de recrutement et pourquoi pas faire appel à des fédérations de réseaux de promotion de la mixité pour étendre leurs sphères.
L’évolution est plus soutenue pour les femmes dans des postes de direction mais le taux reste encore faible. Une potentielle extension de la loi Copé-Zimmerman viendrait soutenir ce ratio car l’effet d’entrainement attendu entre la féminisation des conseil d’administration et la féminisation des comités exécutifs n’a pas eu lieu lors de l’implémentation de la loi Copé-Zimmerman.
(1)Source : McKinsey & Company, octobre 2017. Women Matter Time to accelerate, Ten years of insights into gender diversity
(2)Source : Site 30% club Investor Group, https://30percentclub.org/press-releases/view/six-asset-managers-launch-the-30-club-investor-group-in-france
L’ambition n’est pas le problème mais l’encouragement serait une cause potentielle selon McKinsey. Parmi ceux qui ont l'ambition d'atteindre un poste de top management, le nombre de femmes exprimant leur confiance dans leur réussite était d'environ 15 points de pourcentage inférieur à celui des hommes (58% des femmes contre 76% des hommes). (1)
Engagement actionnarial
Amplegest dispose d’une procédure d’engagement actionnarial qui décrit les différents moyens qu’elle possède pour exercer ses droits de vote, dialoguer avec les entreprises concernées et participer à des actions collectives ou individuelles. Notamment, Amplegest a la capacité d’envoyer des lettres d’engagements lorsqu’elle désire faire part à certaines entreprises de leur désaccord ou de leurs inquiétudes. Aussi, Amplegest vote à 100% aux assemblées générales des valeurs en portefeuilles. Nos équipes de gestion sont donc dans la capacité de pouvoir voter et envoyer des lettres d’engagements sur des sujets de mixité.
GEST QUI NOTE AMPLEGEST
Malgré notre petite structure, il semble pertinent d’analyser Amplegest à travers le modèle GEST et plus particulièrement la mixité pour prendre connaissance de nos points faibles avec pour objectif de les améliorer.
Le ratio de femmes employées au sein d’Amplegest est de plus de 40% sur les 3 dernières années, ce qui semble être un ratio stable qui correspond aux attentes des politiques de mixité.
Aujourd’hui, dans les organes de directions supérieurs, Amplegest compte 25% de femmes. Nous nous rapprochons du ratio de 30% qui reste le plus pertinent car il représente le seuil à partir duquel la masse critique est atteinte, et où les contributions d’un groupe minoritaire commencent à être entendues et valorisées.
Enfin, si nous devions nous attribuer un score sur l’index de l’égalité professionnelle, nous obtiendrions la note de 95/100 car nous respectons les 4 premiers critères et devons fortifier le 5ème critère. La moyenne étant de 85/100 en 2021 en France, Amplegest se situe dans la fourchette haute.
Le détail de notre note est le suivant :
-L’écart de rémunération femmes-hommes : 40/40
-L’écart dans les augmentations annuelles : 20/20
-L’écart dans les promotions : 15/15
-Les augmentations au retour de congé maternité : 15/15
-La présence de femmes parmi les plus gros salaires de l’entreprise : 5/10
Finalement, Amplegest obtient des scores encourageants, qui se situent dans la norme, voire au-dessus. Nous sommes conscients de l’importance d’ouvrir nos organes de direction et de parfaire la mixité dans le top management.
CONCLUSION
Le sujet de la mixité est grandissant au sein des différentes parties prenantes. Les situations varient évidemment selon le secteur et selon le pays, la dispersion transnationale étant beaucoup plus importante(2).
Les pays s’emparent peu à peu du sujet car ils saisissent les effets de politique de mixité mises en place dans les pays voisins et perçoivent leur efficacité. Alors les quotas seraient-ils le seul moyen pour agir ? Après la mise en place de quotas pour les conseils d’administration, ne serait-il pas adapté d’en imposer pour les instances de direction ?
Les entreprises quant à elles, disposent de plus en plus de ressources pour employer des femmes. Malgré ces quelques progrès, des barrières persistent et ce sont aux entreprises de construire de nouvelles conditions et de nouveaux critères pour suivre, mesurer et agir pour la mixité. En ce qui concerne Amplegest, la mixité est un sujet suivi de près par nos équipes car au sein du modèle GEST le pilier Social est celui avec la plus grosse pondération, soit 40% du total.
(1)Source : McKinsey & Company, octobre 2017. Women Matter Time to accelerate, Ten years of insights into gender diversity
(2)Source : Peterson Institute for International Economics, février 2016. Is Gender Diversity Profitable ?